We are the 139%

Le titre, faut-il l’expliquer, fait référence à We are the 99 percent remixé suite aux récents résultats lors des élections russes.

Kamal  El Ganzouri a donné une conférence de presse, assurant que l’armée  n’attaquerait pas des manifestants pacifiques. Quelques minutes plus  tard, une offensive violente a été déclenchée contre eux (…) – sur Global Voices.
Sachons-le déjà, que cela soit clair entre vous et moi : je suis un très mauvais pacifiste. Un exécrable pacifiste qui est pris de nausées et d’accès de violence dès qu’il constate, dans sa veille incessante, les stigmates de la bassesse humaine. Ce dont nous pouvons être capables lorsque l’opportunité s’offre à nous. Je pourrais croire, même, que je suis un indécrottable optimiste qui réagit mal à la chute de ses illusions – cela n’est pas impossible.

J’hésite à trouver ce qui me révulse le plus dans cette nouvelle. Que 13 hommes battent sans relâche une personne déjà à terre ? Ou qu’un homme et un seul profite qu’elle soit à terre, visiblement sonnée, pour lui  écraser la poitrine d’un coup de pied ? Qu’importe pour moi que ça soit ou non une femme, mais la morale de l’histoire est telle : elle  écope d’un surnom, Blue Bra Girl. Ou comment un soutien-gorge peut devenir le symbole d’une révolution.

Comment cela est-il possible ? Comment des hommes qui, il n’y a pas si longtemps, portaient la voix du peuple en se rangeant à côté de lui parce que refusant de l’opprimer, contestant leurs ordres, peuvent-ils maintenant se déchaîner avec rage et violence sur celui-ci qui, au final, lui demande des comptes ? Il est facile de discourir sur l’appât du pouvoir, l’histoire des hommes pullule déjà trop de coups d’État, de putschs, de maréchaux, je me refuse à la faire.

Ce sont ces militaires qui ont fait la révolution et démis, avec le peuple, le président Hosni Moubarak. Ils étaient plusieurs millions, ensemble, unis à ces mêmes militaires que l’ont voit plus haut.

Finalement, ça n’est qu’un prétexte, un fait divers qui ouvre une blessure. J’en ai marre, lecteur. Marre du pacifisme.

Pour moi, il va droit dans le mur. Je ne connais que deux révolutions pacifistes qui d’histoire d’homme furent menées à bien. Deux seulement, et je suis pourtant très souple sur cette définition : l’Inde avec Ghandi (et ce de façon uniquement charismatique, la réalité est toute autre), et celle des Roses. Celle qui est réclamée est trop grande pour se passer de violence. Je n’y crois pas, voilà tout, je ne crois pas qu’elle puisse aboutir.

Ajoutez-y la mort de Vàclav Havel, voilà, je crois que nous sommes à la fin d’une époque de contestation. Maintenant, nous devons passer à autre chose. On ne doit plus faire de « révolution » puisque cela suppose se retourner sur soi-même. Nous ne devons plus entériner les mêmes conneries dans les soubassements des systèmes que nous devrions créer. Il faut passer à autre chose. À une autre forme de révolte.

Plus je lis ce que les tenants du pouvoir (politique et économique, surtout) se permettent, moins j’ai de clémence. Moins je peux encore être pacifiste, bien ordonné à faire une manifestation rangée, un sitting ou du camping urbain.

Je crois, dans mes tripes, qu’il est nécessaire de passer à une forme de diaspora urbaine si l’on veut réellement changer les choses. Désobéissance civile, contestation, prise en otage du système pour le laisser mourir dans ses propres erreurs. Tabula rasa, sans remords.

Une révolte, pure, avec la violence nécessaire pour faire bouger tout un système. Pas une insurrection molle qui ne changera rien sinon l’opinion publique. Agir et prendre le dessus : que le peuple soit un outil de Terreur pour le pouvoir, sur lequel il reprend droit de vie et de mort.

Détruire pour pouvoir construire sur les cendres du monde. Quelque chose d’autre, quelque chose qui ressemble à nos rêves. Pour qu’au final nous ayons tous la paix.

Tu vois, je suis un mauvais pacifiste. Mais j’ai de l’espoir, plein.