elementary OS: mock-ups for human beings

Cela n'aura pas échappé aux techies un tant soit peu au courant de l'actualité des distributions GNU/Linux : la deuxième version majeure -- Luna -- d'elementary OS est sortie. À la louche, il s'agit de la première mise à jour stable en deux ans, puisque la première version majeure -- Jupiter -- était parue le 11 avril 2011.

J'ai longtemps entretenu à l'endroit d'elementary OS un mélange d'élitisme déplacé (« Seulement Debian, Arch Linux, (...) sont de bonnes distributions GNU/Linux », flagornerie à l'égard desdites distributions), de griefs concernant l'utilisation d'Ubuntu comme brique de base (« Ubuntu: the compulsory downstream patch », ou comment j'éprouve un mal certain à concevoir l'empilement de couches et de patchs induits par l'utilisation d'Ubuntu), et de condescendance à l'égard du fait que cette distribution est née d'un thème d'icônes.

Cependant, je ne dénigre pas la création d'un environnement de bureau -- Pantheon -- qui lui est neuf même si teinté de surcouches à des projets existants ou de versions dérivées d'autres projets (Docky à la base de Plank, surcouche à Mutter avec Gala -- un shell qui à l'instar de Gnome Shell se base sur libmutter --, dérivation de BeatBox pour Noise, ...). Bref, je recelais d'une paresse intellectuelle comme je ne m'en connaissais pas de pareille.

Fort du constat de mon indolence, j'ai décidé d'au moins faire un essai de ladite distribution et ne pas m'endormir ignare. Pour télécharger elementary OS, il suffisait de cliquer sur le lien « Download Luna for Free » de la page d'accueil, et de prendre les images 32 et 64 bits pour les essayer sur plusieurs machines (un netbook et un laptop en l'occurence). La fatigue ne me terrassa pas. Pour ceux qui voudraient procéder au téléchargement direct, ils seront redirigés vers le SourceForge du projet elementary OS.

Disques, restauration d'une image ISO

Une fois le téléchargement fait, il me suffisait de transférer l'image ISO sur une clef USB, préalablement retrouvée dans le fatras de mes affaire et insérée dans un port idoine. J'ouvre gnome-disks, j'y sélectionne ladite clef USB, je clique sur la roue dentée en haut à droite de la fenêtre et sélectionne l'option « Restaurer l'image disque ». À ce moment, il ne me reste plus qu'à sélectionner l'un des fichiers ISO précédemment téléchargés et attendre pendant le déroulement de l'opération. Donc de prendre un café. Encore une fois, pas de quoi harasser un nerd en vacances.

Le test fut rapide : il s'agissait pour moi de prendre connaissance de l'ambiance générale de la distribution, de son utilisabilité et de sa distribution logicielle. Et sur ce point j'ai été agréablement surpris : l'ensemble est bien pensé, cohérent dans le style et la légèreté. Surtout, j'ai été impressionné par la célérité générale de l'environnement. En Live USB, soit sur un Samsung N210 ou un HP Pavilion dm4, aucune application ne met en moyenne plus d'une ou deux secondes à être lancée, ce qui est pour le moins appréciable. Aucune application ? Non, une application résiste encore et toujours à la légèreté, la Logithèque Ubuntu, qui est toujours aussi abominablement lente que dans mon souvenir. Le système lui-même ne met pas plus de deux minutes en moyenne pour se lancer, ce qui est agréablement surprenant pour un système en Live.

La distribution logicielle est rudimentaire, certes, mais elle recouvre la plupart des besoins en fonctionnalités du système. Tout ce qui n'est pas préinstallé est à trouver dans la bibliothèque de programmes d'Ubuntu qui reste très fournie, avec le risque cependant de tomber sur des applications moins bien intégrées à l'ensemble. L'utilisateur pourra installer à sa guise [Skype](https://help.ubuntu.com/community/](https://wiki.ubuntu.com/Valve), LibreOffice, ... de quoi étendre encore un peu la plupart des besoins bureautiques qui peuvent être remplis par la distribution.

Même si elementary OS ressemble toujours autant à une galerie de mock-ups empilés sur Ubuntu, l'environnement de bureau pantheon est bien foutu, rapide et réactif, même si je ne suis aucunement convaincu par les choix esthétiques. Malgré mes réticences au thème (qu'il est possible de changer, heureusement, mais je n'attends pas d'un utilisateur lambda de parvenir à le faire), je crois qu'il est un atout d'elementary OS : faire un objet esthétiquement cohérent qui puisse donner envie de l'utiliser. Et sur ce point, je crois qu'elementary OS est une réussite.

L'objet est stable, fonctionnel, et je crois qu'il pourra très bien convenir à ceux dont l'informatique se retreint à la messagerie instantanée, lire ses mails, naviguer sur Internet, faire un peu de bureautique, regarder des vidéos ou écouter de la musique. Empathy (qui garde bizarrement son thème de conversation par défaut), Geary, Maya et Dexter, Midori, Firefox ou Chromium, Abiword et Gnumeric ou LibreOffice, Totem et Noise peuvent tout à fait remplir la majorité des besoins de tels utilisateurs qui pullulent.

Je ne peux pas m'empêcher d'un peu jouer les Cassandre, et d'avoir une appréciation en demi-teinte. Même si je crois qu'en l'état Luna peut très bien convenir à une bonne masse d'utilisateurs, c'est à mon avis seulement maintenant que les développeurs d'elementary OS doivent prouver qu'elle peut être une distribution fiable à l'avenir. Sommairement, il s'agit d'essayer d'imaginer comment s'annonce la transition vers la troisième version. Considérant le public visé, il est nécessaire qu'elle se fasse de façon transparente et sans effort, ce qui augmente d'autant plus la hauteur du challenge : il s'agira de gérer la dépendance à Ubuntu en en étant quelque peu tributaire.